Blanc, forcément teinté de gris
Une dalle de pierre sur l'ouverture d'un puis. Une plaque de fer faisant office de couvercle à un bocal pourtant aux trois-quarts vide. Une muselière sur la robe d'une d'oie. Une vectrice d'actes manqués et de mondes - que l'on supposera mirifiques, supposition subjective faute de mieux- perdus.
Et le blanc, le blanc immaculé, le blanc déraisonné, le blanc dont on voudrait qu'il se salisse, qu'il se tâche, que des constellations de signes et de symboles pleuvent sur son indécente neutralité, sur sa virginité forcée, en grosses gouttes bleues ou noires, des gouttes qui tombent en rythme, désordonnées mais possédant leur ordre propre.
Un blanc qui est trompeur, qui possède sans l'afficher clairement des nuances de gris. Gris comme la pensée qui s'étiole, faute d'être exprimée comme elle voudrait l'être. Elle n'est pas manipulable à foison, mais bien insaisissable. Elle ne repasse pas. Elle ne laisse le soin à aucun carnet de la croquer, la demi-mesure ne l’intéresse pas, c’est un tout qu’elle désire, ou alors se résoudre à n’obtenir d’elle que son contraire.
Ce blanc qui peut-être demain ne sera plus, mais qui n'abandonne jamais, chasseur à l'affût de l'idée fugace qu'il brisera dans son élan. Le blanc qui enveloppe et détruit tout, et dont on ne peut prévoir les méfaits comme le moment de ses agissements.
Tout pour sortir de cette lactescence qui nargue. Qui me nargue. Il suffit de peu ... On n'est pas grand chose...Pas ce que l’on semble être, ni ce que l’on voudrait être. Rien qu'un assemblage d'idées hétéroclites ballottées au gré des vents. Aucune ne vaut l'autre. Comme le reste.
Cette intruse source d’angoisses, emporte inexorablement dans ses écumes indécises les mots qui prenaient forme, tandis que se dessillent les encres et les illusions.
La page blanche comme un rappel, comme un signal...